A 40 ans et après 51 jours 1 heure et 42 minutes de mer, Jérémie Beyou a franchi le Cap Horn pour la première fois de sa carrière maritime ce mardi à 13h44 UTC en troisième position du Vendée Globe. Un soulagement et une délivrance pour le skipper de Maître CoQ, pas mécontent de quitter l’océan Pacifique et de démarrer « une nouvelle course » vers les Sables d’Olonne.
© Olivier Blanchet / Maitre Coq
Et de trois ! Après Bonne-Espérance et Leeuwin, Jérémie Beyou a laissé sur bâbord le troisième et dernier cap de son tour du monde, puisqu’il a franchi ce mardi 27 décembre à 13h44 UTC la longitude du Cap Horn après 51 jours 1 heure et 42 minutes. Soit le troisième chrono de tous les temps en solitaire sur un monocoque, derrière ceux réalisés par les deux skippers qui le devancent au classement de ce Vendée Globe, Armel Le Cléac’h et Alex Thomson, passés au Horn vendredi dernier pour le premier, dimanche pour le second.
Joint lundi lors de la vacation quotidienne de l’organisation de course, Jérémie, s’il restait avant tout concentré sur sa trajectoire et les empannages délicats à venir, a livré son sentiment avant de devenir cap-hornier pour la première fois, à 40 ans. « J’ai pris beaucoup de départs de tours du monde, entre le Vendée Globe, le Trophée Jules-Verne et la Barcelona World Race, à chaque fois, je n’ai pas réussi à passer le Cap Horn, donc il est temps ! », a-t-il commenté, avant d’ajouter : « Le Pacifique a été long avec des conditions météo pas faciles qui ne m’ont pas permis de progresser de façon très rapide. Je suis content de sortir de cette zone un peu compliquée, il est temps de changer de coin, parce qu’ici, ce n’est pas le plus sympa. »
En guise d’au revoir, le Pacifique, dans lequel il aura passé 18 jours, lui a d’ailleurs réservé un franchissement de Cap Horn « technique et intense » dans 30-35 nœuds d’un vent arrière l’obligeant à quelques empannages, une manœuvre jamais facile dans ces conditions, surtout après plus de 50 jours de mer, mais également parce que le couloir étroit entre le « caillou » et la zone interdite des glaces ne donnent guère le droit à l’erreur. Après ce premier passage de Horn, que Jérémie a vécu avec émotion, compte tenu des nombreuses péripéties qu’il a connues depuis son départ des Sables d’Olonne le 6 novembre, il s’agit de penser à la suite et notamment à la remontée de l’Atlantique Sud qui réserve souvent son lot de surprises, bonnes ou mauvaises, et dans laquelle s’est souvent jouée l’issue du Vendée Globe. Le retour d’Alex Thomson sur le leader Armel Le Cléac’h (écart passé de 800 milles au Horn à moins de 300 mardi matin) en est la preuve : tout peut arriver dans cette zone météo très instable.
« C’est une zone dans laquelle il y a une bataille permanente entre les dépressions qui passent au sud, un chapelet de petites dépressions qui descendent du nord-ouest et l’anticyclone de Sainte-Hélène », explique Philippe Legros, responsable Performance au sein de l’Equipe Voile Maître CoQ. Jérémie Beyou est bien conscient de cette difficulté et le but pour lui est de rester le plus longtemps possible sous l’influence d’une dépression qui génère un bon flux d’ouest et lui permet de conserver une bonne vitesse. Et même si ses problèmes d’électronique l’empêchent de disposer des mêmes armes que ses concurrents, c’est avec le mors aux dents qu’il aborde la dernière partie de son tour du monde : « La course va reprendre un peu ses droits, je vais regarder comment je suis par rapport aux deux premiers, étudier aussi quelle trajectoire ils ont prise et ce que je peux prendre comme trajectoire. Le jeu va se rouvrir un peu, ça va être une nouvelle course, il va falloir s’engager au maximum pendant ces dernières semaines. » Il y a quatre ans, François Gabart, futur vainqueur du Vendée Globe et par rapport auquel le skipper de Maître CoQ est en avance de plus d’une journée, avait mis 26 jours pour parcourir les 7000 milles séparant le Cap Horn des Sables d’Olonne, Jérémie Beyou va s’atteler à aller au moins aussi vite…