Un maximum dans un minimum

7 novembre 2012

Dans 18m de long par 5m  de large (au plus large), le skipper Maître CoQ, engagé sur le Vendée Globe 2012, va devoir embarquer pour trois mois de nourriture, ses dix voiles autorisées par le règlement de course, les outils, le matériel de rechange et de réparation, ses vêtements pour supporter les températures extrêmes des 50èmes rugissants, l’équipement vidéo et informatique et, bien sûr, tout le matériel médical et de sécurité obligatoire. Bref, il faut embarquer le maximum dans un minimum d’espace et pour un minimum de poids : un véritable défi à l’ingéniosité, relevé par le Team Maître CoQ.

 

Le dilemme des coureurs au large est toujours le même : embarquer l’ensemble du matériel nécessaire pour faire face à tous les aléas techniques et météo possibles dans un espace très limité, tout en gardant un bateau le plus léger possible. Ainsi, pendant les mois de préparation précédant le grand départ, Jérémie Beyou et son équipe ont optimisé chaque élément, pièce ou avitaillement à embarquer sur ce tour du monde.

 

L’avitaillement, par exemple, est empaqueté par ration journalière. Chaque aliment a été débarrassé des conditionnements superflus. La ration de chacun de ces sachets quotidiens contient juste la quantité de calories nécessaires pour la météo rencontrée, à priori, ce jour-là.

 

Les outils et le matériel de rechange sont, eux aussi, sortis des emballages inutiles et triés sur le volet. Ils sont ensuite rangés dans de simples bacs en plastique dont les couvercles, en composite ou en carbone, peuvent être utilisés par Jérémie pour une réparation.

 

Autre astuce parmi tant d’autres : en cas de fracture, Jérémie pourra se soigner grâce des bandes de plâtre constituées d’une résine médicale qui se durcie au contact de l’eau. Ce matériel, conçu pour un usage médical professionnel est à la fois pratique et léger.

 

Bref, chaque détail a été étudié, pensé, rentabilisé pour être le plus efficace et rentable possible.

 

 

 

Le matériel embarqué de Jérémie Beyou

 

Outils de communication Les solitaires du Vendée Globe entrent tous les jours en liaison avec le PC course, pour des raisons de sécurité, mais aussi de communication. Ils appellent aussi régulièrement leur équipe et, bien sûr, leurs proches. Jérémie disposera de quatre téléphones au total.

 

Énergie Deux sources principales d’énergie alimenteront l’électronique et l’informatique du bord du monocoque Maître CoQ : un hydrogénérateur et une génératrice alimentée par le moteur gasoil de 37 CV, obligatoire.

 

Matériel de sécurité Il y aura à bord du monocoque Maître CoQ tout le matériel obligatoire, dont deux radeaux de survie, six balises de positionnement, des fusées de détresse, des gilets de sauvetage, de la fluorescéine, etc.

 

Vêtements Deux jeux de ciré, une combinaison étanche, une combinaison de survie (TPS), des « sous-couches », des « premières couches », des polaires et des « wind-stoppeurs » de la marque Musto, partenaire technique de Jérémie Beyou.

 

Hygiène Jérémie se servira au quotidien de lingettes, brosse à dents et rasoir. Les douches seront occasionnelles, sous une averse ou avec un seau d’eau salée et du shampoing spécial lorsque la course et le climat le permettront.

 

 

 

Avitaillement 

 

Substitut de repas, œufs brouillés lyophilisés, gâteaux secs pour le petit-déjeuner, des repas complets à base d’un féculent et d’un apport protéiné grâce à des plats à base de poulet Maître CoQ spécialement conçus et conditionnés pour Jérémie par la marque « Marie », des repas lyophilisés, de soupes chinoises, viande séchée, conserves, de barres de céréales, fruits secs, salades de fruits…

 

Au total, ce sont 110 kg de rations journalières que Jérémie va embarquer pour ses trois mois de course. Il disposera également de deux dessalinisateurs électriques, et manuels à la fois. Le règlement impose également aux solitaires d’embarquer 18 litres d’eau potable.

 

 

 

Le pain pour se nourrir… mais pas seulement

 

Il y en revanche une chose pour laquelle Jérémie ne se limitera pas : c’est le pain ! Mais pas n’importe quel pain… Le skipper Maître CoQ va embarquer quatre pains de 900gr, spécialement conçus pour les marins, par Michel Izard un « maître » boulanger. Le concept de ce pain qui se conserve jusqu’à 30 jours, a été mis au point il y a une quinzaine d’années par ce boulanger-voyageur, désormais installé dans les Abers (à Lannilis dans le Finistère).

 

 

 

Quel plus beau symbole du partage, du repas et de la famille que le pain ? Pour Jérémie Beyou, c’est ce lien si évocateur des racines terriennes qu’il emportera à bord de Maître CoQ.

 

Michel Izard, de la Maison du Boulanger, un expert du pain : « Le pain est né d’une complicité implicite avec un marin des Abers. Nous avons réfléchi ensemble à un pain qui réponde à un besoin gustatif, qualitatif et vital. Après plusieurs essais, le pain a été baptisé pain des Abers et testé sur le Trophée Jules Verne. Il est composé de farines bio ou label rouge, de froment, seigle et un petit peu de sarrasin puis des quatre autres ingrédients, l’eau, le levain, le sel et un peu de levure. Il faut le pétrir lentement, 15 minutes. Puis on le laisse dehors, on lui donne des rabats, on le pèse, on le façonne, on le met en banneton et on le laisse fermenter entre 12 et 24 heures selon la saison.

Ce qui fera la différence, c’est ce que tout le monde recherche et a de moins en moins : le temps, dont a besoin le levain pour fermenter. Il est l’âme du pain qui apporte toutes les subtilités olfactives, gustatives, l’acidité, la mâche.

La cuisson se fait dans un four à bois à l’inertie importante. On va le monter en température jusqu’à 240 °, le laisser poser puis enfourner. Le pain va cuire à chaleur dégressive, s’épanouir et commencer la formation de la croûte. À la fin de la cuisson, le pain sera à 220°. La croûte va se colorer et développer les arômes.

Pour assurer une bonne conservation, vont suivre deux cuissons à température descendante. Cela  va épaissir la croûte sans trop cuire l’intérieur et sans trop la colorer. Entre deux cuissons, il faudra laisser le pain refroidir, au risque de ramollir la croûte. C’est elle qui permet la conservation du pain puisqu’elle va éviter les échanges d’hydrométrie entre la mie et l’air ambiant.

Le pain de Jérémie sera cuit trois fois et cela va se faire sur trois jours parce qu’il faut laisser refroidir une quinzaine d’heures entre deux cuissons. À la boulangerie, nous savons que nous avons une responsabilité importante ; quand on mange du pain et que l’on ferme les yeux, la mémoire gustative est importante, on s’évade et ce moment nous souhaitons qu’il soit le meilleur possible pour Jérémie. »