Maître CoQ, voyage en terrain connu

11 janvier 2017

Depuis que Jérémie Beyou a franchi l’Equateur hier mardi après 65 jours, 1 heure et 27 minutes de course, le skipper de Maître CoQ négocie sa sortie d’un Pot au noir qui aura été, pour lui, gluant mais pas collant. Toujours 3ème, à quelques 500 milles du 2ème, Alex Thomson, et avec la même marge sur son plus proche poursuivant, Jean-Pierre Dick, Jérémie Beyou peut envisager les dix derniers jours de course avec sérénité… et la plus grande vigilance.

© Eloi Stichelbaut / Maitre Coq

65 jours, 1 heure et 27 minutes après avoir coupé la ligne de départ des Sables d’Olonne, Jérémie Beyou a signé son retour dans l’hémisphère nord. Toujours aussi solidement ancré à la troisième place, le Landivisien a signé un temps canon entre le Cap Horn et l’Equateur, un tronçon qu’il a englouti en 13 j 23 h 45 min. C’est un tout petit peu moins bien qu’Alex Thomson (Hugo Boss), qui a mis 18 h 15 min de moins, mais c’est mieux qu’Armel Le Cléac’h qui a mis 14 j 11h 49 m. C’est également mieux que le temps établi par le Saint-Politain en 2012 sur le même bateau, qui portait alors les couleurs de Banque Populaire (14 j 9 h 15 min).

En ce mercredi 11 janvier, il ne reste pour Jérémie Beyou que 3000 milles à parcourir. Une broutille pourrait-on dire à l’échelle des 24 410 milles théoriques que compile le tour du monde par les trois caps. Les eaux que fend désormais Maître CoQ, Jérémie Beyou les a sillonnées bon nombre de fois et, dans l’esprit du skipper, chaque heure de mer annonce l’imminence du retour à la maison. Sauf que rien n’est joué.

Petits alizés et grandes questions
D’abord, même si le Pot au noir aura été sans doute moins contrariant pour l’actuel 3ème du Vendée Globe que pour le leader, Armel Le Cléac’h, il n’aura pas été si coulant que prévu. Cette nuit encore, Jérémie Beyou a dû composer avec les humeurs versatiles d’alizés perturbés par le passage d’une dépression, et il devra encore faire avec ces soubresauts pendant 24 à 36 heures avant de retrouver… des conditions incertaines. A terre, l’équipe de Maître CoQ se creuse la tête et se demande qui, des modèles américain et européen, aura vu juste. « La situation est très hésitante pour la période des 15, 16 janvier, souligne Philippe Legros, le responsable Performance de l’équipe voile Maître CoQ. Les modèles ne sont pas d’accord du tout entre eux. Et ce n’est que lorsque les deux modèles convergent qu’on peut avoir des certitudes ».

D’où quelques questions, que les heures à venir effaceront. Est-ce que Jean-Pierre Dick, qui devrait parvenir à grignoter quelques poignées de milles à Jérémie au cours des prochaines heures, se muera en réelle menace ? Jérémie pourra-t-il encore gommer un peu de son retard sur Alex Thomson et Armel Le Cléac’h, et maintenir ainsi cette position d’attente qui lui permettrait de tirer bénéfice de la moindre opportunité ? Les positions des quatre premiers du Vendée Globe resteront-elles en l’état ?

Vent de près, mer de face… les bateaux ont souffert
« Quand on fait tourner les routages et qu’on évalue les options potentielles, explique Philippe Legros, c’est en prenant en compte l’idée qu’un pépin mécanique ralentisse un des protagonistes. Est-ce que les marges seront suffisantes pour que chacun maintienne sa position ou est-ce qu’il y aura une brèche dans laquelle s’engouffrer ? C’est ça, le raisonnement. Tous les bateaux ont souffert, notamment dans cette remontée de l’Atlantique au près avec la mer de face ». S’il ne peut bénéficier des retours d’expérience de son équipe à terre, l’assistance étant interdite, Jérémie Beyou doit certainement parvenir aux mêmes conclusions en mer. Au classement de 11h, Armel le Cléac’h était à 712 milles et Alex Thomson pointait son étrave à 500 milles plus au nord.

Espoir et prudence
L’IMOCA 60’ Maître CoQ, quant à lui, se porte bien. Jérémie Beyou est même parvenu à cocher toutes les tâches d’entretien et de maintenance qui lui étaient dévolues, dont le changement de lashing de J2 qui tient le mât. Une opération pas évidente à réaliser tout seul, mais parfaitement réalisée. De quoi se soulager d’une inquiétude potentielle. Une petite frustration demeure, cependant : tandis que les deux leaders peuvent faire tourner leurs logiciels de routage pour se faire une idée précise du temps qu’il leur reste à passer en mer, Jérémie Beyou, lui, continue à avancer la vue un peu brouillée, faute de recevoir tous les fichiers météo. Difficile donc pour le guerrier de se projeter totalement sur l’idée que le chenal des Sables n’a jamais été aussi proche. Et, avec lui, le podium ?! Réponse en fin de semaine prochaine…